Comment respecter la procédure de licenciement à distance ?


Comment respecter la procédure de licenciement à distance ?

La Covid-19 a entrainé de nombreuses conséquences pour les entreprises notamment en matière de conditions de travail. Conditions de travail venant parfois impacter les procédures en cours. Ainsi, à l’heure de la généralisation du télétravail, quels sont les moyens de communication pouvant être utilisés lors de la procédure de licenciement ?

1. Comment convoquer un salarié à un entretien préalable ?

1.1 LES Modalités de communication legales

L’article L 1232-2 du Code du travail impose à l’employeur de convoquer le salarié par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge.

Toutefois, la jurisprudence a validé l’envoi de la convocation par :

  • Un service de transport rapide (ex : Chronopost)[1].
  • Voie d’huissier [2].
  • Lettre recommandée électronique.

1. 2 Modalités prohibÉes

Il a été jugé irrecevable la transmission de la convocation :

  • Verbalement
  • Par télécopie.

A ce jour, la Cour de Cassation ne s’est pas prononcée sur la validité d’une convocation par email. Ce moyen nous apparait risqué dès lors que l’employeur n’a pas connaissance de la date exacte de l’ouverture du mail par le salarié. Par conséquent, nous vous conseillons donc :

  • De l’envoyer avec une demande d’accusé de réception et de lecture.
  • D’inviter le salarié à confirmer la bonne réception de l’email.
  • De justifier le recours à ce moyen de communication (exemple : difficultés d’acheminement).

Rappel : l’entretien préalable ne peut avoir lieu avant l’expiration du délai de 5 jours après la présentation de la convocation. Le non-respect de ce délai constitue une irrégularité de procédure.

2. Peut-on réaliSer l’entretien préalable en visioconférence?

2.1 Principe de la présence physique

L’entretien préalable se tient en principe sur le lieu d’exécution habituel du travail. Cependant, l’employeur peut organiser l’entretien préalable dans un lieu extérieur à l’entreprise tel que :

  • Dans une salle de réunion de coworking.
  • Dans un café, dès lors que la confidentialité des échanges est garantie et que des circonstances objectives le justifient.

2.2 Le recours à la téléconférence : une solution naissante à confirmer

Les arrêts de Cour d’Appel divergent sur la possibilité de tenir l’entretien préalable par visioconférence, voire par entretien téléphonique. Certaines décisions ont validé le recours à ce moyen dès lors que les parties avaient exprimé leur accord[3].

De même, un récent arrêt de la Cour d’Appel de Versailles a confirmé cette tendance en validant le recours à la téléconférence dès lors que :

  • Les circonstances le justifient (exemple : éloignement géographique. Dans le cas d’espèce, la salariée était expatriée à Dubaï alors que la direction se trouvait en France[4]).
  • La salariée a eu la possibilité de se défendre utilement et était assistée.

Cet arrêt a fait l’objet d’un pourvoi en Cassation. Dans l’attente de la décision de la Haute Cour, nous vous conseillons, en cas de recours à ce moyen

    1. de recueillir l’accord du salarié.
    2. de veiller à ce que ses droits à la défense soient respectés (possibilité de faire valoir ses observations, assistance par un conseiller du salarié ou un salarié de l’entreprise…etc).
    3. de s’assurer de la fiabilité des moyens techniques afin de garantir un échange de bonne qualité (connexion internet, microphone fonctionnel…etc).

3. Comment notifier le licenciement ?

3.1 Ce que prévoit la loi

Le Code du travail prévoit seulement la notification par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR).

A noter que le défaut de remise de la lettre de licenciement imputable aux service postaux n’entache pas la régularité du licenciement.[1]

L’employeur peut également recourir à d’autres modes de communication dès lors qu’il peut justifier de la date d’envoi et de réception de la lettre. A ainsi été jugée valable la notification :

  • Par lettre simple (à condition que le salarié confirme par retour la bonne réception. Nous déconseillons néanmoins de recourir à ce moyen.).
  • Par remise en main propre.
  • Par voie d’huissier.
  • Via un service de transport rapide. Il est primordial de s’assurer que le courrier a bien été délivré au salarié. En effet, en cas d’absence du salarié à son domicile, la première présentation du courrier par le coursier ne peut s’analyser comme une première présentation d’une lettre recommandée.

Le non-respect de la notification du licenciement par lettre recommandée avec avis de réception ne rend donc pas nécessairement le licenciement irrégulier, si la date de remise peut être prouvée.

Rappel : L’irrégularité de la procédure est sanctionnée par une indemnité plafonnée à 1 mois de salaire et ne peut se cumuler avec l’indemnité pour licenciement abusif (Article L. 1235-2 du Code du travail).

4. Spécificités de la procédure de licenciement économique

4.1 quid de la remise du Contrat de Sécurisation Professionnelle (« CSP ») ?

Lors d’un licenciement économique dans une entreprise/groupe de moins de 1000 salariés, l’employeur doit proposer le CSP à chaque salarié en lui remettant, contre récépissé, un dossier qu’il s’est procuré auprès de Pôle emploi.

Or, seule la remise en mains propres est donc prévue par la Convention UNEDIC relative au CSP.

Néanmoins, aucun texte ne prohibe expressément la communication du CSP par lettre recommandée. Cette modalité de communication est difficile à mettre en œuvre, puisque l’employeur doit indiquer la date de remise du CSP à compter de laquelle débute le délai de réflexion de 21 jours dont dispose le salarié.

De même, rien n’interdit de transmettre ces documents par email. Dans le cas d’un entretien préalable en téléconférence, nous vous recommandons :

  • D’inviter le salarié à confirmer la bonne réception des documents
  • De veiller à ce qu’il complète, signe et renvoie les documents par courriel après les avoir scannés.

4.2 Les modalités de consultation du CSE à distance

En raison de l’état d’urgence sanitaire, l’Ordonnance n°2020-389 du 1er avril 2020 a permis à l’employeur d’organiser les réunions du CSE :

  • Par visioconférence, dès lors qu’il en a informé les membres du CSE.
  • Par conférence téléphonique, après information des membres du CSE.
  • Par messagerie instantanée (seulement en cas d’impossibilité de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique).

Le recours à ces dispositifs est possible pour toutes les réunions du CSE prévues par le Code du travail.

Ce dispositif a été reconduit par une Ordonnance du 25 novembre 2020 jusqu’à la fin de la période d’état d’urgence sanitaire, fixée aujourd’hui au 1er juin 2021.

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Les obligations de l’employeur prévues par la loi sont nombreuses et leur inobservation peut entrainer de lourdes conséquences.

Ne restez pas seul et optez pour un support personnalisé et adapté à vos besoins.

Maître Alexandre KANDEMIR
Cofondateur de GMK Conseil et avocat au Barreau de Paris spécialisé en Droit Social.

[1] Cass. soc. 8 février 2011, n° 09-40027
[2] Cass. soc. 30 mars 2011, n° 09-71412
[3] CA Nancy, 30 août 2017, n° 16/03065
[4] CA Versailles, 6ème ch. 4 juin 2020, n° 17/04940
[5] Cass. soc. 30 novembre 2017, n° 16-22569

Maître Alexandre KANDEMIR

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